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jeudi 31 mai 2018

Avec joie et docilité

Johanna Sinisalo : Avec joie et docilité
Auringon ydin (2013)
éd. Actes Sud, 2016 
trad. Anne Colin du Terrail, couv. Chez Gertrud

République eusistocratique de Finlande, 2013. La nation a pris en compte ses erreurs historiques.
La stabilité sociale et la santé publique sont désormais les valeurs prédominantes. Tout ce qui procure du plaisir ou est susceptible de causer une quelconque dépendance est formellement interdit, y compris le café. À une exception près : le sexe. La distribution de sexe  un produit de consommation essentiel à la paix sociale doit être aussi efficace que possible. À cet effet, le corps scientifique gouvernemental a généré une nouvelle sous-espèce humaine, les éloïs. De type blond, réceptive et soumise, l'éloï est jugée apte pour le marché de l'accouplement et sera vouée à favoriser par tous les moyens le bien être de son époux. Les morlocks, en revanche, éléments de la population féminine jugés trop indépendants et difficilement domesticables, sont une espèce en voie de disparition. Stérilisées dès leur plus jeune âge, elles constituent un réservoir de main-d'œuvre affectée à des tâches de nature répétitive.
Vanna est née avec les traits d'une éloï mais le caractère d'une morlock et réussit, au prix de mille efforts, à se faire passer pour une éloï. Mais la comédie risque d'être de courte durée, l'intelligence et la curiosité se laissent difficilement dompter...
Avec beaucoup de finesse, Johanna Sinisalo nous invite à nous interroger sur les mécanismes de la manipulation des masses et la place de la femme dans nos sociétés. Un thriller dystopique aussi troublant que ludique par la reine du finish weird.
Sous la forme réussie mais trompeuse d'une fable dystopique (1) remarquablement agencée, toute en contrastes saturés et oppositions outrées, Johanna Sinisalo nous propose une vision coup de poing de travers et dérives aberrantes que peuvent présenter nos sociétés.
Le propos n'est pas nouveau mais, pour une fois, le politiquement correct n'a pas eu droit au chapitre et, ne cédant pour ainsi dire jamais à la facilité de se révolter de manière on ne peut plus légitime, l'autrice, sans fard (!), sans le moindre recul, sans le plus petit filtre, nous balance à la tête des images et des situations qui n'ont rien d'irréel mais dont toute l'absurdité est mise en avant, outrée, surexposée.
Ce n'est pourtant rien d'autre que le monde, tel que nos ancêtres et nous-mêmes l'avons connu à différentes époques dont la présente, qui nous est décrit. À mon sens, (2) l'adoption de cet angle de vue bien particulier sur les choses fait une grande différence : Sinisalo se moque, juge très sévèrement tout en offrant un texte très souvent hilarant si l'on prend le recul nécessaire. (3)
Si le patriarcat, qui n'a jamais cessé de sévir me semble-t-il, se voit sans hésitation refaire le portrait, l'autrice n'oublie pas pour autant de se demander pourquoi certaines femmes semblent jouer le jeu et se satisfont (voire recherchent) cette situation qui n'a pas le moindre sens. C'est frappant dès la couverture du roman qui peut s'interpréter de différentes manières.
Johanna Sinisalo semble avoir largement dépassé le stade de la colère et s'appuie sur celui d'un rire glaçant et impitoyable. Une critique sociale et politique sardonique et affligée tout autant qu'hilarante. Du rire et de l'horreur.
Avec joie et docilité se penche également vers ceux qui ne peuvent pas s'en satisfaire mais vivent pourtant au beau milieu de ce qui les révolte, ceux pour qui certaines règles sont inacceptables mais qui, jour après jour, s'y conforment néanmoins, sont entraînés dans un tourbillon grotesque et apparemment sans fond. Ces déviants de toute espèce qui n'aiment pas penser en rond et recherchent l'évasion par l'esprit, que ce soit artificiellement ou non.  Mais l'autrice se penche particulièrement sur les seconds et, il me semble, démontre une connaissance qui donne à penser qu'elle les a observé de près et qu'elle les a compris. (4)
Bref, j'ai totalement adoré et je pourrais en causer durant des heures mais, là, à moi-même, c'est un peu chiant...
Pour distribuer de vigoureuses taloches à tout le monde tout en éclatant sincèrement de rire devant un absurde démesuré, je ne connaissais que Catherine Dufour. (5)

(1) Bien entendu, c'en est une ! Impossible de ne pas penser à Brunner, Atwood ou Orwell, pour ne citer que ceux-ci qui, comme Johanna Sinisalo, ont décrit des sociétés cauchemardesques qui sont les reflets grossis de celles dans lesquelles nous nous ébattons joyeusement à grands coups de pouces vers le haut et... vers le bas.
(2) Mais je peux me tromper, je ne connais pas tout. D'autres auteurs ont peut-être usé comme elle de ce registre.
(3) Dans le cadre d'une lecture de roman, on peut s'y autoriser. Mais qui a pu résister et empêcher le rire en lisant les extraits de documents gouvernementaux, du code de loi, de manuels scolaires ou de préparation aux bals et mariages et autres qui, tous, ressemblent parfois furieusement à ce que nous connaissons ?
(4) En ce sens, cette eau sombre qui clapote au fond de la Cave, tout au long du roman, m'a frappé. Tout le monde a une eau sombre qui clapote au fond de la Cave et, à un moment ou à un autre, se voit bien obligé d’écoper...
(5) Attention, ce n'est pas le même ton...

dimanche 27 mai 2018

Dans la toile du temps

Adrian Tchaikovsky : Dans la toile du temps
Children of Time (2015)
éd. Denoël, Lunes d'Encre, 2018 
trad. Henry-Luc Planchat, couv. Gaelle Marco

La Terre est au plus mal... Ses derniers habitants n'ont plus qu'un seul espoir : coloniser le « Monde de Kern », une planète lointaine, spécialement terraformée pour l'espèce humaine. Mais sur ce « monde vert » paradisiaque, tout ne s'est pas déroulé comme les scientifiques s'y attendaient. Une autre espèce que celle qui était prévue, aidée par un nanovirus, s'est parfaitement adaptée à ce nouvel environnement et elle n'a pas du tout l'intention de laisser sa place. Le choc de deux civilisations aussi différentes que possible semble inévitable. Qui seront donc les héritiers de l'ancienne Terre ? Qui sortira vainqueur du piège tendu par la toile du temps ?
Premier roman de l'auteur paru en France, Dans la toile du temps s'inscrit dans la lignée du cycle de L'Élévation de David Brin. Il nous fait découvrir l'évolution d'une civilisation radicalement autre et sa confrontation inévitable avec l'espèce humaine. Le roman a reçu le prix Arthur C. Clarke en 2016.
Somptueux planet opera, (1) ce premier roman d'Adrian Tchaikovsky démontre avec brio la grande connaissance du genre que possède son auteur, ainsi que sa capacité à s'emparer de thèmes déjà traités par d'illustres prédécesseurs (2) pour les mettre au service de son histoire.
Loin d'être une resucée d'histoires mainte fois lues, le roman d'Adrian Tchaikovsky intègre ses propres idées et passions, intercale avec art les deux formes de vie qui l'intéressent ici. D'un côté, les maigres restes d'une humanité exsangue et acculée à quémander sa survie, de l'autre, une civilisation naissante et artificiellement accélérée. (3)
Trompeuse, la présentation de l'éditeur pourrait faire croire à une confrontation entre deux formes de vie pour leur propre existence. Mais c'est de difficulté à se comprendre dont nous parle ici l'auteur, de tout l'intérêt qu'il peut y avoir à tenter de saisir ce qu'est l'Autre, de l'intégrer à son mode de vie en modifiant le sien propre de manière conséquente sinon radicale, afin que cela soit possible. Si choc il y a, il est culturel avant tout.
Entre autres thèmes dont se sert l'auteur, celui de la croyance religieuse est très présent, une comparaison intéressante étant faite de deux conceptions opposées de celle-ci.
La toute fin du roman indique que la réflexion est loin d'être entièrement contenue dans celui-ci, pourtant déjà très riche, extrêmement dense et d'une minutie captivante. Comme un second roman d'Adrian Tchaikovsky semble prévu l'année prochaine, j'aime à espérer qu'il prolongera aussi brillamment les pistes empruntées par celui-ci.
Pour ceux qui n'oseraient pas saisir ce livre par crainte de la forme de vie non-humaine choisie par l'auteur, ne vous arrêtez pas à cela. Il s'agit simplement d'une forme de vie... différente. Et aucune des images que vous pourriez craindre ne viendra vous faire frissonner d'horreur. Bien au contraire !
Et puis... comment ne pas encenser un livre dans lequel je trouve pour la première fois de ma vie une définition de la femelle idéale qui me convient ? (4)

(1) Voir ce qu'en dit la page Wikipédia consacrée à cette branche de la SF.
(2) Le vibrant hommage rendu à David  Brin, outre son signalement par la quatrième de couverture, est clairement revendiqué par l'auteur dès la première ligne de son roman. Ce dernier, de loin en loin, ne pouvant que rappeler les incursions d'autres auteurs dans les nombreuses thématiques qu'il présente.
(3) Visiblement, ce n'est pas l'humanité qui intéresse le plus Adrian Tchaikovsky, ce qui semble lui être systématiquement reproché par les lecteurs dont j'ai pu lire les avis mais qui ne m'a absolument jamais dérangé, certaines scènes côté humain étant en outre très drôles dans leur description.
(4) Page 358, vers le bas. « Pour Fabian, la femelle idéale possède trois qualités : [...] ». Vous ne pensiez tout de même pas sérieusement que j'allais vous la livrer ici ?

mardi 1 mai 2018

Lazarus

Lazarus : Lazarus 
(1971 - Bearsville) 
Trio américain mené par le compositeur, chanteur, violoniste et guitariste Billie Hugues, (1) Lazarus sort ce premier album en 1971, (2) véritable merveille de compositions qui, toutes, font preuve d'un sens des plus aiguës de la mélodie et des harmonies. Tout est beau dans ce disque, certaines mélodies étant à mon sens belles à en mourir et capables de faire fondre le plus rock des rockers. (3)
Ballade folk-rock après ballade folk-rock, le groupe sait toucher sans efforts repérables et piège pour longtemps l'auditeur (4) qui se demande bien comment il a pu louper ce bijou pendant 47 ans.
Ce que j'ignore, c'est l'investissement du directeur musical, Peter Yarrow. (5) La richesse et le travail sur les voix et les arrangements me laissent néanmoins penser qu'il n'a pas hésité à retrousser les manches. (6)
Pour ceux qui aiment les comparaisons, si les ballades de Neil Young ou les chansons de Simon and Garfunkel ne vous font pas fuir en hurlant, vous pourriez bien vous régaler autant que moi. Bizarrement, j'ai également pensé à Harmonium bien que ces groupes soient très différents.
Le monde est beau. (7)

Quelques exemples : Refugee, Whatever Happened, Eastward.

Musiciens :
- Carl Keesee : basse, chant

- Bill Hughes : guitare, violon, chant
- Gary Dye : piano, orgue, chant

(1) Une longue et bien remplie carrière s'offrira à lui par la suite, puisqu'il sera l'auteur de nombreuses compositions (parfois avec sa compagne Roxanne Seeman) pour des musiciens renommés ainsi que pour le cinéma et la télévision).
(2) Un second disque du groupe voit le jour en 1973, A Fool's Paradise, peut-être un cran au-dessous de celui-ci mais je ne vois aucune autre « raison » que le goût personnel pour écrire cela...
(3) Tout du moins parmi ceux qui écouteront ce qui se passe dans ce disque fabuleux et dont la mauvaise foi ne fera pas pousser une longue et virile plainte d'agonie tout en sortant un briquet de la main droite et un mouchoir de la gauche.
(4) Je. Mais d'autres s'identifieront peut-être après écoutes attentives ?
(5) Lui-même guitariste, chanteur et compositeur au sein du trio Peter, Paul and Mary, que je ne connais pas bien encore mais dont le premier album, Peter, Paul and Mary date de 1962.
(6) J'allais raconter mais... je vous invite plutôt à lire, si ce n'est déjà fait, ce que dit la page Wiki dédiée au groupe Lazarus au sujet de ses débuts.
(7) Si, si, parfois...